« Mon basket a parlé pour moi »
Comme pour la cérémonie des Césars, quel speech as-tu préparé pour la remise du trophée ?
« Parce que je vais devoir faire un commentaire devant une assistance ? Alors là, tu me l’apprends ! Sérieusement, si c’est le cas, j’imagine que je vais simplement remercier ceux qui ont voté pour moi. Après… Waouh, c’est dur, en fait. Instinctivement, je dirai que celui qui m’a donné les clefs, qui m’a mis en confiance et libéré le chemin, c’est J.D. Il a immédiatement compté sur moi et n’a jamais dévié de sa ligne de conduite. »

« Mon but n’était que de réussir mon année, d’être régulier dans mes prestations. Rien d’autre. Je n’imaginais surtout pas ça, donc oui, être MVP est d’abord une surprise. Ce n’est qu’à mi-saison, quand j’ai commencé à entendre que j’étais en course, qu’alors je me suis posé la question, mais rien de plus. A la limite, c’est en lisant le programme de match du club que j’ai réalisé que j’étais souvent nominé par la rédaction de L’Equipe. Je n’y prêtais pas attention sauf que, à force, c’est vrai que mon nom revenait régulièrement. Après, dire que c’est me rendre justice, non. »
Imaginais-tu prendre une telle dimension ?
« Je ne pensais pas que ce serait aussi… facile. Les années précédentes, je traversais un gros coup de mou après les vacances de Noël. Je démarrais et finissais fort mais, au milieu, je plongeais et il me fallait du temps pour remonter la pente. Cette fois, aucune coupure. Je suis resté constant. La déconnexion n’a pas surgi. Fini le mode pause, le côté grandes vacances au cœur de l’hiver. Tant mieux ! »
Qui craignais-tu le plus dans la course au trophée de MVP et pour quelles raisons ?
« Il n’y avait qu’Amara (Sy). Sitôt sa blessure digérée, il a démarré la saison sur les chapeaux de roue, a réalisé de grosses stats et changé la physionomie de l’ASVEL. On ne parlait que de lui et c’était normal. Après, il y a eu le décès de son père au moment de la Semaine des As. Il a accusé le coup. Le titre aurait pu lui revenir de droit, ce n’aurait pas été immérité. Comme on est vraiment potes, le voir désigné m’aurait fait plaisir. »
Ta personnalité, sinon effacée à tout le moins mesurée, a-t-elle été un handicap dans la reconnaissance de ta valeur par le milieu basket ?
« C’est possible. C’est même probable. Les gens aiment le spectacle et les personnalités extraverties, celles qui en font toujours plus. Moi, ce n’est pas mon truc. Mon jeu est flashy mais mon caractère ne l’est pas. Sur un dunk, certains gars crient ou font des trucs de fou. Moi, rien, je reste stoïque. Je ne force rien, je n’y pense même pas, ça me semble tellement naturel que je n’ai pas le réflexe de me lâcher. Je suis bien plus excité sur une super action des autres. Donc oui, j’imagine que mon côté calme et non exubérant a pu jouer en ma défaveur. Heureusement, mon basket a parlé pour moi. »
En quoi le capitanat, récupéré après le transfert de Brian Chase, a changé ton statut au sein de l’équipe ?
« Aïe ! A vrai dire, en début d’année, tout le monde voulait que j’endosse le capitanat. Mais moi, avant le vote de mes coéquipiers, j’ai insisté pour qu’on laisse la responsabilité à Brian, bien plus vocal. Et comme J.D. m’avait laissé cette option… Après, je n’ai pas trop eu le choix. Forcément, cette charge a modifié mon positionnement dans l’équipe. Je suis devenu celui qui porte le message du groupe ou de joueurs auprès de Christophe (Le Bouille) et de J.D., un côté délégué de classe, oui. Quand il y a des trucs que des gars n’osent pas dire, je dois m’y coller. Je ne sais pas si je le ferai chaque année mais, comme je ne l’imaginais pas ainsi, j’y ai plutôt pris goût, à bien y réfléchir. »
« Peu d’adversaires nous font peur en championnat »
Tu n’as pas encore 26 ans et pourtant tu es un vétéran du club et de la Pro A. As-tu la sensation de marquer l’histoire du MSB et comment devenir une figure emblématique du championnat ?
« Que je le veuille ou non, je crois que je vais marquer l’histoire du MSB. Je dois être le premier joueur à sortir du centre de formation et à avoir joué dix ans dans la foulée ici. En plus, j’y ai gagné tous les titres possibles en France. Quant à la Pro A, le moyen le plus simple est de réussir le triplé ! »

Justement, à tous vous écouter et voir, réussir le triptyque As-Coupe-Championnat est un objectif très fortement désiré et clamé. As-tu déjà ressenti pareille motivation dans un groupe depuis que tu joues ici ?
« Pas vraiment. C’est la première fois qu’on le crie haut et fort. Auparavant, on le savait entre nous mais ça ne sortait pas du vestiaire. Là, depuis les As, on se sent forts. On sait que notre basket est mieux et que l’on peut être dur à arrêter quand on déroule notre jeu. On a conscience de nos moyens. A quoi bon le cacher ? Cet état d’esprit, on le doit à notre série de victoires et à la personnalité de nos deux joueurs les plus forts, David et Dee. C’est bizarre à dire mais peu d’adversaires nous font peur en championnat. On se dit même qu’avec notre équipe actuelle, eh bien l’Euroleague aurait été une autre histoire. »
Cet été, et sauf retournement de situation, tu seras de la campagne bleue pour l’Euro. Est-ce pour toi le début d’une nouvelle ère ?
« Je l’espère, mais encore faut-il réussir un truc avec l’équipe de France. Si tel est le cas et que j’y tiens un rôle de cadre, alors j’imagine que je vais passer un cap. Les coaches et clubs européens me verront d’un autre œil. »
Tu arrives en fin de contrat et la logique voudrait que tu rejoignes le bataillon des Français qui s’illustrent à l’étranger. Quel minime espoir existe de te voir rempiler au MSB ?
« Il y en a deux importants : le marché et l’Euroleague. Vu la situation économique en Europe, je n’ai pas de certitude absolue qu’un club signera un chèque pour m’engager. Quant à la seconde condition, ça dépend directement de nous. Et j’ai bien l’intention de la remplir en arrivant à mes fins sur le terrain ! Atteignons nos objectifs et, ensuite seulement, il sera toujours temps d’en parler. »